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En cette chaude journée caniculaire, j’ai décidé de parler de l’un de mes propres travaux de recherche, publié il y a un an. Ce travail traite des implications du Grand Collisionneur de Hadrons (le LHC au CERN) pour des particules hypothétiques appelées sgluons. Pour les plus motivés, l’article est disponible en accès libre ici.

[image credits: Brücke-Osteuropa (CC0 1.0) ]
Même si le mot sgluon peut sembler rigolo ou même issu de Harry Potter ou du Seigneur des Anneaux, l’idée derrière cette particule n’est pas si farfelue que ça.
Tout d’abord, il faut accepter l’idée qu’il est nécessaire de généraliser le Modèle Standard de la physique des particules. Je rediscuterai de cela brièvement ci-dessous.
Ensuite, il faut faire l’hypothèse que la supersymétrie est un bon moyen d’effectuer cette généralisation. Je reviendrai là-dessus également.
Finalement, vu que nous n’avons toujours pas observé la supersymétrie dans les données, on peut reprendre l’hypothèse ci-dessus et se dire que la supersymétrie existe mais de façon potentiellement moins évidente que prévu. La nature serait ainsi supersymétrique mais non-minimalement.
En prenant en compte tout cela, on arrive à un cadre théorique qui d’une part résout plusieurs des problèmes du Modèle Standard, et d’autre part explique pourquoi nous n’avons pas encore observé de phénomènes nouveaux aujourd’hui.
Au-delà du Modèle Standard
Le Modèle Standard de la physique des particules (voir ici, ici et là) est clairement la théorie la plus testée de tous les temps. Après avoir fixé une poignée de paramètres, les prédictions sont confirmées par plus d’un siècle de données.

[image credits: photovicky (CC0)]
Cependant, certains problèmes conceptuels font que les physiciens considèrent le Modèle Standard comme la partie visible d’une théorie plus fondamentale qui doit encore être découverte.
Par exemple, la matière noire se trouve partout dans l’univers, sauf dans le Modèle Standard.
Le boson de Higgs résout la problématique de la masse des particules (qui seraient non massives sans lui) mais apporte une tonne de problèmes (comme celui de la hiérarchie) en échange.
Et la liste peut être allongé significativement : la masse des neutrinos, l’unification des interactions, etc.
Supersymétrie
Dans la nature, nous avons deux classes de particules, appelées respectivement bosons et fermions, qui diffèrent par leur spin. Pour faire court, le spin joue un rôle fondamental dans les propriétés magnétiques des particules et lorsque l’on construit des systèmes de particules identiques. Mais je n’entrerai pas dans les détails.
Dans le Modèle Standard, le secteur de la matière est fait de fermions tandis que les interactions fondamentales sont transmises par les bosons. La supersymétrie établit un lien entre les bosons et les fermions.

[image credits: everywhere on the web]
Dans un monde supersymétrique, chaque fermion du Modèle Standard se verra associer un partenaire bosonique, et inversément.
On double ainsi la quantité de particules dans la théorie.
L’avantage est que l’existence des partenaires supersymétriques offre une solution à de nombreux problèmes du Modèle Standard. Cependant, aucun d’entre eux n’a encore été observé.
Si l’option minimale ne fonctionne pas, peut-être suffit-il de regarder l’option suivante, un peu moins minimale?

[image credits: Pixabay (CC0)]
Prenons les médiateurs de l’interaction forte, les gluons.
Leur partenaire supersymétrique est le gluino, qui a comme propriété d’être sa propre antiparticule. Cette dernière propriété peut mettre les physiciens mal à l’aise, de sorte que l’on pourrait vouloir l’éviter.
Dans ce cas, il nous faut une particule supplémentaire : un gluon sans spin appelé sgluon.
Perspectives pour la chasse aux sgluons
Théoriquement, la production de sgluons au LHC devrait se manifester via la production de 4 quarks top, ce qui représente un défi au niveau de la détection.
Cependant, la iciproduction de 4 quarks top a finalement été mesurée pour la première fois fin 2017. On peut donc vérifier si l’on peut déceler dans les données un impact de la présence de sgluons.
C’est ce que mes collaborateurs et moi-même avons fait. Nos résultats sont les suivants :

[image credits: Inspire]
En gris, il s’agit des prédictions théoriques concernant le taux de collisions au LHC qui donnent lieu à quatre quarks top par l’intermédiaire de sgluons. L’axe x est la masse du sgluon, dont ce taux dépend.
En jaune-vert, il s’agit du taux maximal permis par les données, que nous avons extrait des résultats expérimentaux.
Lorsque le gris est au-dessus du jaune-vert, la masse de sgluon correspondante est exclue. Sinon, elle est autorisée car les effets des sgluons sur la production de 4 quarks top sont trop faibles pour être observés.
Nous avons trouvé que les sgluons doivent être au moins aussi lourd que 5 fois la particule la plus lourde du Modèle Standard, le quark top, ce qui réduit significativement les options autorisées pour l’existence de sgluons.
La chasse n’est cependant pas terminée. De nouvelles données sont en effet disponibles, et on est actuellement en train de voir si l’hypothèse de l’existence des sgluons leur survit. Une exclusion nous en apprendrait presqu’autant qu’une découverte!
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